Aimer nos ennemis |
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Aimer son ennemi n'est pas du domaine du sentiment mais de la volonté profonde, du choix, d'un désir d'être en accord profond avec les lois du Royaume. Si aimer son ennemi n'est pas du domaine du sentiment mais de la volonté profonde, il en va de même pour l'amour de son ennemi. En effet, aimer une personne, c'est lui vouloir du bien. C'est pourquoi nous disons que l'amour procède de la volonté. D'autre part, être amoureux n'est pas du tout aimer. Si aimer est poser un acte de volonté, être amoureux est recevoir indépendamment de sa volonté un sentiment d'attirance, d'affection, de bien-être, une inclination à s'approcher de l'autre, etc. Aimer est actif et être amoureux est passif. Si tous les couples unis connaissaient cela, ils comprendraient mieux pourquoi être amoureux doit devenir peu à peu aimer parce que dans l'esprit de l'homme, aucun sentiment ni aucune émotion ne peut vivre définitivement dans un état maximal. Et cela est encore plus vrai concernant deux personnes qui doivent passer le restant de leur vie ensemble. Aussi tout couple doit anticiper les premières crises en recherchant les moyens sérieux de poser l'amour sur des fondements sérieux. Les couples qui ont tenu plusieurs décennies le confirment : l'amour évolue au fil des années - passion, amour, tendresse, affection, etc. - et doit s'appuyer sur des réalités concrètes fortes afin de pouvoir passer avec succès les épreuves de la vie. Ici n'est pas le lieu d'approfondir le sujet. Ce qui compte par rapport à la première citation donnée plus haut, c'est que l'amour procède toujours de la volonté, que l'objet de l'amour soit un ennemi ou un ami. Aimer l'ennemi veut dire respecter la personne de celui ou de celle qui nous fait mal, le reconnaître dans son identité d'enfant de Dieu, dans sa différence. Aimer l'ennemi et aimer l'ami exige de respecter effectivement l'autre dans sa diversité, par rapport à soi, à sa communauté, sa nation, dans sa façon de penser, d'être et d'agir. Mais cet amour n'implique pas une adhésion totale à ce que représente l'autre. Ainsi, on peut aimer un ami ou un ennemi sans pour autant adhérer à sa façon de vivre ou certaines de ses pensées. C'est pourquoi, il est en particulier juste de devoir aimer tout homme, même non chrétien, sans adhérer aux croyances religieuses non catholiques. Mais là, nous abordons un des thèmes du faux oecuménisme actuel (...). Les saints qui nous sont des exemples et Jésus qui nous est l'exemple par excellence, ont toujours aimé leurs ennemis mais ont toujours refusé d'adhérer voire condamné les convictions religieuses des amis et des ennemis, non par complexe de supériorité ou orgueil, mais parce que la grâce du Christ agissant en l'esprit de ces hommes et de ce Dieu-Homme leur fait réaliser que la Vérité est en Dieu seul et que hors du Christ, la Vérité ne devient que vérité, la Vérité universelle ne devient que vérité générale, particulière ou individuelle. Jésus comme les saints aiment tout homme, mais n'aiment pas ce qui s'oppose à la Vérité incarnée en Jésus, ce qui s'oppose à la véritable sagesse de Dieu. Voilà encore un sujet à approfondir... L'acte intérieur de pardon envers l'ennemi pourrait s'exprimer ainsi : "aujourd'hui, je te pardonne, je remets ta dette et je m'engage à respecter ta personne". Aimer l'ennemi, c'est lui vouloir du bien et non du mal, c'est reconnaître les fruits qu'il porte, la fécondité de sa tâche, en demeurant cependant dans le discernement et la prudence nécessaires." SIMONE PACOT Saint Jean Chrysostome enseignait à juste titre que le pardon, qu'il soit envers un ennemi ou un ami, doit se faire selon le même mode où l'homme a péché. Ainsi, celui qui a mal pensé envers son prochain, devra intérieurement demander pardon à Dieu d'avoir une telle pensée; celui qui a volé son prochain, devra lui restituer son bien ou l'équivalent dans une proportion supérieure au mal causé; celui qui a insulté un homme en public, devra demander pardon en public à l'homme insulté. Ce Père de l'Eglise Orthodoxe établit ce sublime enseignement à partir des écrits de l'homme dont il était tombé amoureux, Saint Paul. L'acte de pardon se fait ainsi soit intérieurement soit extérieurement selon le mode de l'acte du péché. Cela ne réduit pas la grande valeur et la nécessité du saint sacrement de réconciliation. Le pardon est un acte découlant naturellement de l'amour, et ce, quel que soit le lien qui nous unit à notre prochain, ami, collègue de travail, frère dans la vraie foi, membre de famille, conjoint ou encore supérieur. On ne peut dire aimer si on refuse le pardon. Et si on ne se sent pas capable de pardonner, ce qui est tout à fait compréhensible au regard des horreurs dans le monde, l'amour devra s'exprimer de toutes les manières possibles afin que l'âme se sente un jour comme attirée vers ce pardon nécessaire, tant pour le pécheur que pour le blessé. Jésus, sur la croix, a pardonné ses bourreaux. Oui mais Jésus est Dieu, disent certains. Oui Jésus est Dieu et il est également Homme. Et son pardon envers les bourreaux fut donné aussi bien en tant que Dieu que Homme. Sans quoi il faudrait dire que dans la personne de Jésus, il n'y a pas eu harmonie et conformité parfaite des deux volontés, ce qui est erreur. Lorsque le pardon est difficile à donner, ayons toujours l'humilité de nous tourner vers la croix du Christ, de nous jeter au pied de la croix, de nous plonger dans les saintes plaies de Notre Rédempteur, et d'implorer Dieu, le temps nécessaire, à nous aider de pardonner. Effectivement, lorsque le prêtre pardonne au pécheur, c'est le Christ à travers le prêtre qui pardonne. Mais il n'est pas moins vrai que Dieu a besoin de nous. Nous sommes ses coopérateurs à l'action et l'expansion de sa grâce et la Très Sainte Mère de Dieu en est le plus bel exemple. En effet, Jésus est la Tête de l'Eglise et le Corps de l'Eglise est formée des chrétiens fidèles. Or l'une des belles missions du Christ Total est le pardon. Puisque la Tête donne le pardon, il est juste que le Corps contribue à ce même pardon en acceptant de pardonner à son ennemi, ennemi dans le sens général. C'est ce que nous apprenons dans le Pater Noster. Alors oui, si Dieu pardonne parce que son amour incline à pardonner ses bourreaux, il faut aussi ajouter que tout homme doit apprendre à pardonner, même si cela prend du temps, à ses propres bourreaux. Sinon, comment peut-on demander au Père le pardon de nos fautes si nous-mêmes refusons de pardonner à notre prochain ? (Eccli 28,3-5 Un homme réserve sa colère pour un homme, et il demande à Dieu sa guérison ? Pour un homme semblable à lui, il n'a pas de compassion, et pour ses propres péchés, il prie avec instance ? Lui, qui est chair, garde sa colère, et il demande à Dieu de lui être proprice ?; Mt 6,15 Mais si vous ne remettez pas (les leurs) aux hommes, votre Père ne pardonnera pas non plus vos offenses.) Bien fraternellement dans le Christ, votre dévoué saint Augustin Augustinius Avec l'accord précieux de son auteur notre Ami Augustinius
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Date de dernière mise à jour : 30/05/2022