Créer un site internet

Notre Père

   
 

Gif sainte trinite

Notre Père

 

   

Notre Père qui es aux cieux,

 

Que ton nom soit sanctifié,

 

Que ton règne vienne,

 

Que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel.

 

Donne-nous aujourd'hui notre pain de ce jour.

 

Pardonne-nous nos offenses

 

Comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés

 

Et ne nous soumets pas à la tentation,

 

Mais délivre-nous du mal.

 

Vient ensuite :

 

Car c'est à toi qu'appartiennent

 

Le règne, la puissance et la gloire.

 

Pour les siècles des siècles,

 

Amen !

Quelles sont les erreurs de ce texte ?

 

1/ On remarquera que le tutoiement est utilisé car le latin et le grec ignoraient le voussoiement. L'usage du vous apparaîtra lorsque, l'empire romain étant confié à plusieurs souverains, on s'adressera de manière collective à chacun d'eux. On retrouve le tutoiement dans certaines traductions françaises du Pater du XIIIè au XVIè siècle, mais le bon usage du XXè siècle exige par respect le pronom vous. D'ailleurs, même si l'Eglise Catholique actuelle préconise le tutoiement pour cette prière, pourquoi alors conserve-t-elle le voussoiement pour le Je vous salue Marie ? Pourquoi tutoyer Dieu et vouvoyer un être humain (même si la Mère de Dieu n'est pas n'importe quel être humain) ?

2/ On peut se demander pourquoi l'épiscopat français imposa une très médiocre traduction du Pater, dépourvue de toute autorité et cuisinée par un protestant anonyme en 1922. (cf. Etude faite par l'Abbé Carmignac dans son livre A l'écoute du Notre Père de 1975, Editions de Paris et de Letouzey dans Recherches sur le Notre Père de 1969)

3/ Ajoutons que la formule finale "Car c'est à toi...", bien que tardive, est typiquement juive. Elle apparaît du reste dans un certain nombre de manuscrits, notamment le codex Freer du VIè siècle. L'Eglise catholique a certainement fait oeuvre de rapprochement oecuménique (sic !) autant vers les juifs que vers les protestants en la réintroduisant dans la liturgie eucharistique lors de la réforme conciliaire.

Le texte actuel apporte quelques fautes de traduction non négligeables.

4/ C'est une erreur de remplacer "arrive" par "vienne". Le verbe venir marque un mouvement dont l'aboutissement reste vague tandis que le verbe arriver exprime au contraire l'aboutissement du mouvement. S'agissant du règne de Dieu par la grâce, il faut évidemment adopter "arrive" conformément au texte latin (advenire signifie arriver, advenir) et à l'enseignement de l'Evangile. En effet, d'après plusieurs versets, le règne de Dieu est proche et même présent parmi nous :

 

Mt 3,2 Repentez-vous, car le royaume des cieux est proche.

 

Mt 10,7 Sur votre chemin, annoncez ceci : "Le royaume des cieux est proche.

 

Mc 1,15 Le temps est accompli, et le royaume de Dieu est proche;...

 

Lc 10,9 ...et dites-leur : "Le royaume de Dieu est proche de vous.

 

Lc 17,21 ...car voici que le royaume de Dieu est au dedans de vous.

 

Saint-Cyprien explique à propos du Pater : "Nous demandons que le règne de Dieu nous soit rendu présent" (De orat. domini, 13)

5/ C'est une erreur de remplacer "cieux" par "ciel". En effet et comme on le voit dès la première ligne du Pater, il y a plusieurs cieux et non un seul. Saint-Paul ne fut-il pas ravi jusqu'au troisième ciel ? L'Enfer et le Purgatoire ne font-ils pas eux aussi partie des cieux ? Ne parle-t-on pas dans le Nouveau Testament du Royaume des Cieux ?

6/ Une autre erreur est de traduire le latin quotidianus (quotidien) par "de ce jour" au lieu de "chaque jour" car le Corps du Christ est notre pain de chaque jour.

D'autre part, saint-Jérôme, dans son commentaire sur l'Evangile selon saint-Matthieu, décrit ce qu'il lit dans l'évangile sémitique de l'apôtre : "Dans cet évangile, à la place du mot supersubstantiel, j'ai trouvé mahar, qui signifie de demain, en sorte que, dans le Pater, le sens est : "Donne-nous aujourd'hui notre pain de demain", c'est-à-dire de l'avenir (Migne, vol.26 col. 43). En effet, l'eucharistie est le pain qui donne la vie, la vie éternelle, la vie qui n'est pas présente mais celle de l'avenir.

7/ Une autre erreur est l'ajout du mot "aussi". Ce mot veut restituer le et latin et le kai grec. Mais il se rapporte à "nous" et non à "pardonnons". Si l'on tenait à l'ajouter, il aurait fallu traduire : "comme nous aussi nous pardonnons". Ce n'est pas la même chose de pardonner comme Dieu le fait ou de pardonner à certains comme à d'autres.

8/ Une autre erreur mais plus difficile à expliquer est l'emploi du mot "tentation". Le texte latin dit en effet : et ne nos inducas in tentationem. Mot à mot : "et ne nous induis pas en tentation". Le texte grec a exactement le même sens : le verbe eisphêrein correspond à inducere ou, mieux, à inferre qui, d'après saint-Augustin, se rencontrait dans certaines versions.

A s'en tenir au mot à mot, il faudrait comprendre que Dieu, même s'il ne tente pas lui-même, conduit l'homme à subir la tentation, l'expose donc positivement au risque de céder au mal. Or si Dieu, bien que parfait, peut permettre le mal qui est une insuffisance de bien (le mal de Satan souille alors que le mal de Dieu punit les méchants), il ne peut pas le favoriser. Comme dit la théologie catholique : "Dieu ne peut pas, en raison de son infinie perfection, être la cause d'un défaut moral." Saint-Jacques le confirme dans son épître (1,13) : Que nul, lorsqu'il est tenté, ne dise : "C'est Dieu qui me tente"; car Dieu ne saurait être tenté de mal, et lui-même ne tente personne.

Nous pouvons dire que Dieu éprouva Abraham (en l'invitant à sacrifier Isaac) ou Job (en semblant l'abandonner au pouvoir de Satan), pour ne citer qu'eux, mais ne les tenta en aucune façon. Plusieurs anciennes prières hébraïques et araméennes supplient Dieu de ne pas livrer l'homme à ce type d'épreuves insurmontables humainement, sauf grâce très particulière. Pour la tradition juive, toute confrontation avec le diable est toujours une épreuve douloureuse et dangereuse. Elle l'est même pour l'entourage, qui ne se montre pas forcément toujours aussi fidèle et donc protégé que l'homme de Dieu qui combat en première ligne. Il va de soi que Dieu ne tente et ne veut le mal de personne, mais s'il donne sa grâce libératrice et qu'on la refuse, il permet et laisse faire les conséquences de ce libre refus.

Nous nous trouvons devant une fâcheuse énigme : comment le Pater peut-il contredire la doctrine ? L'abbé Carmignac nous apporte la clé du mystère. On sait qu'il a démontré que la première version des Evangiles synoptiques était hébraïque : mais on avait jusque-là toujours admis que saint-Matthieu avait écrit le sien en araméen. Or l'hébreu et l'araméen possèdent tous deux une conjugaison particulière, le causatif, qui exprime à la fois la cause et l'effet : au causatif, "entrer" signifie "faire entrer". La négation placée devant le causatif peut s'appliquer soit à la cause soit à l'effet, selon le jugement du lecteur : on aura ainsi "ne pas faire entrer" ou "faire ne pas entrer". Le sens réel du texte hébreu perdu du Pater aura été : "fais que nous n'entrions pas en tentation". Le traducteur grec, ne pouvant rendre sans s'écarter du mot à mot une nuance que lui-même, sémite, sentait, s'en est tenu à un décalque servile. D'où le problème.

Qu'ils aient connu ou ignoré la solution de ce problème, les commentateurs du Pater ont tous donné à la phrase en cause son sens réel.

 

ð     Origène (De la prière, 29 – Pat. gr. 11 col. 529-545) écrit : "Il répugne de supposer que Dieu induise quiconque en tentation... Combien n'est-il pas absurde de supposer que Dieu bon qui ne peut porter de mauvais fruit expose quelqu'un au mal ?"

 

ð     Tertullien (Liber de orarione, 8 – Pat. lat. 1 col. 1163-1164) précise : "Ne nous induis pas en tentation, c'est-à-dire ne souffre pas que nous soyons tentés."

 

ð     Saint-Cyprien (Liber de oratione dominica, 25-26 – Pat. lat. 34 col. 1282) explique qu'il est nécessaire de prier en disant : "Et ne souffre pas que nous soyons induits en tentation."

 

ð     St-Augustin (De sermone Domini in Monte, II 9 n°30 – Pat. lat. 34 col. 1282) fait remarquer que beaucoup utilisent cette dernière formule "car Dieu n'induit pas lui-même mais souffre que nous soyons induits" en nous retirant son aide à cause de nos péchés.

 

ð     St-Thomas d'Aquin (Le Pater et l'Ave, NEL 1967) donne cette dernière explication.

 

ð     Ste-Thérèse d'Avila (Le chemin de la perfection, ch. 40) écrit à propos du Pater : "Demandons (à Dieu) de ne pas souffrir que nous commettions (des péchés) à l'avenir en succombant à la tentation."

 

ð     Et Bossuet (Méditations sur l'Evangile, Sermon sur la montagne), commentant la même sixième demande, dit qu'il faut entendre : "ne permettez pas que nous y entrions (en tentation)."

 

ð     Les protestants Calvin et Segond donneront le même sens. La formule "ne nous laissez pas succomber à la tentation" s'imposera le plus souvent dès la fin du XVIIè siècle.

 

La nouvelle formulation n'est pas seulement injurieuse à l'égard de Dieu, mais elle contient aussi une grave erreur doctrinale qui n'est pas sans rappeler une fois de plus   la Gnose. Pour  les gnostiques, le Dieu des juifs n'est qu'un démiurge (le Grand Architecte de l'Univers) dont Platon parlait déjà, auteur du monde matériel et donc du mal. Or on sait que ce n'est pas Dieu qui a créé le péché mais Satan.

 

9/ L'Eglise catholique actuelle a la fâcheuse tendance non seulement de faire croire que Dieu n'est qu'Amour et Miséricorde mais aussi que le mal n'existe pas ou s'il existe, cela n'a rien à voir avec des démons et Satan. Or rappelons juste que le Christ est venu sur Terre il y a deux mille ans pour mettre fin au règne de Satan et qu'un des tout premiers dons qu'il donna à ses Apôtres fut de chasser les démons. Cela nous permet de voir que dans la septième demande de la prière "délivre-nous du mal", le mal fait vraiment allusion au péché, c'est-à-dire au Mauvais, à Satan.

A partir de ces différents éléments, voici la prière telle que nous devrions réciter :

 

Notre Père qui êtes aux Cieux,

 

Que votre nom soit sanctifié.

 

Que votre règne arrive,

 

Que votre volonté soit faite,

 

Sur la Terre comme aux Cieux.

 

Donnez-nous notre pain quotidien (ou de chaque jour voire de demain)

 

Pardonnez-nous nos offenses,

 

Comme nous (aussi nous) pardonnons à nos offenseurs (ou à ceux qui nous ont offensés),

 

Et ne nous laissez pas succomber à la tentation (ou à l'épreuve)

 

Mais délivrez-nous du Mauvais (ou du Malin ou de Satan).

 

Amen !

                                  

 

Augustinius

Avec l'accord précieux de son auteur notre Ami Augustinius

 

Date de dernière mise à jour : 02/07/2021

Créer un site internet avec e-monsite - Signaler un contenu illicite sur ce site