Le Renoncement

 

 

 

Le Renoncement

 

But de la vie terrestre

Pour savoir à quoi l'homme doit et peut renoncer dans sa vie, rappelons d'abord le but de toute vie humaine selon les mots de saint Thomas d'Aquin :
"La conserver n'est pas le but de ta vie; c'est de la perfectionner, jusqu'à former en toi la ressemblance avec Dieu. Telle est la loi de ton être et la condition de ton bonheur. Pécheur, tu perds cette ressemblance; juste sur la Terre, tu l'as, mais imparfaite; saint dans le ciel, tu la posséderas dans sa perfection. Alors, et alors seulement, tu pourras dire : "J'ai atteint le but de ma création; je suis semblable à Dieu." (S. Th., I P., Q. 93, art. 8, ad 3)
La vie ne consiste pas en une passivité attristante où l'homme attend sa mort (ou la provoque) ou en une vie dégradante éloignant l'homme de Dieu, le privant ainsi de la vie éternelle.

La vie éternelle

Puisque par la grâce du Christ, l'homme peut espérer vivre un jour dans son Royaume, dans un bonheur sans égal, un bonheur parfait et éternel, rappelons (imparfaitement) en quoi consiste cette vie, à la lumière de ce que l'Eglise enseigne.
La vie éternelle est éternité, perfection, joie, charité, louange, gloire, grâce, union, adoration.
Eternité, car l'homme vivra en Dieu qui est l'Eternel.
Perfection, car Dieu est la perfection même. En lui, rien de souillé, rien d'impur.
Joie, car les anges ne chantent-ils pas sans cesse de joie pour la gloire de Dieu qu'ils contemplent en permanence ?
Charité, car l'homme aimera parfaitement Dieu pour Lui-même et à travers les anges et les saints.
Louange, car la joie de la l'homme sera si grande qu'il le criera à jamais.
Gloire, car l'homme sera définitivement fils de Dieu, en tant que participants à la nature divine.
Grâce, car l'homme sera uni en Jésus-Christ qui siège à la droite de Dieu le Père.
Union, car l'Esprit-Saint unira parfaitement tous les adorateurs de Dieu en tant qu'Eglise parfaite.
Adoration, car c'est pour cela que Dieu a créé l'homme avec amour.

N'est-ce pas un beau programme ? Si vous êtes d'accord, alors sachez que ce n'est rien comparé à la vie même que le Père nous offre par son Fils Jésus-Christ ! Si vous êtes en désaccord, vous avez raison car cette description traduit une imperfection dans la connaissance et la perception des mystères divins, de ce que nos sens ne peuvent encore vivre par la grâce de Jésus. Mais ces mots sont quand même un reflet de la vérité, même si ce reflet est pâle et entaché. 

Comment obtenir la vie éternelle ? 

A maintes reprises dans l'Evangile, Jésus nous répond de différentes manières. Voici une de ses réponses :
Et voici qu'un docteur de la loi se leva, se levant pour le tenter, dit : "Maître, que ferai-je pour posséder la vie éternelle ? Jésus lui dit : Qu’y a-t-il d’écrit dans la loi ? Qu’y lis-tu ? Celui-ci répondant, dit : Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton coeur, de toute ton âme, de toutes tes forces, et de tout ton esprit; et ton prochain comme toi-même. Jésus lui dit : Tu as bien répondu; fais cela, et tu vivras. (Lc 10,25-28)
A celui qui désire la vie éternelle qui est la vraie vie, qu'il s'attache alors à aimer Dieu plus que tout, et à aimer Dieu à travers son prochain, qu'il soit ami ou (encore) ennemi. Beaucoup de grands auteurs ont écrits sur ce sujet, aussi je me contenterai de vous donner quelques références bibliques sur la vie éternelle :
Mt 19,16-17 (Mc 10,17-21 / Lc 18,18-22); Mt 19,21; Mt 19,28-29 (Mc 10,29-30 / Lc 18,29-30); Mt 25,45-46
Jn 3,15-16; Jn 3,36; Jn 4,14; Jn 4,36; Jn 5,24; Jn 5,27-29; etc.
Rm 2,7-8; Rm 5,20-21; Rm 6,22-23; etc.

Et concrètement ?

L'homme qui désire cette vie devra choisir et qui dit choisir, dit renoncer. Jésus nous dit qu'il faut nous attacher à vivre avant tout pour l'amour de Dieu. Cela peut se faire de nombreuses manières : les saints sacrements, l'oraison, les oeuvres de piété, la pratique des vertus...
Cela suffit-il ? Cela rappelle un point de divergence entre une erreur affirmée par les protestants et une autre erreur affirmée par des catholiques. Les premiers croient que la foi seule suffit pour être sauvé. Les seconds croient que le salut peut s'obtenir par les oeuvres seules. (Ce n'est pas le débat ici, et renvoyons les premiers vers I Co 13,2 et les seconds vers Tt 3,5.) Si le salut se fait selon la grâce du Christ moyennant la foi, les Apôtres, à la suite de Jésus (Jn 15,9-10 Comme mon Père m'a aimé, moi aussi je vous ai aimés: demeurez dans mon amour. Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez dans mon amour, comme moi-même j'ai gardé les commandements de mon Père, et comme je demeure dans son amour.), nous commandent de vivre dans la charité, de vivre à l'image du Christ (I Jn 4,11-12 Mes bien-aimés, si Dieu nous a ainsi aimés, nous devons aussi nous aimer les uns les autres. Personne n'a jamais vu Dieu; mais si nous nous aimons les uns les autres, Dieu demeure en nous, et sa charité est parfaite en nous.). Ils nous demandent d'avoir une vie irréprochable, une vie exemplaire, cherchant avant tout à plaire à Dieu (Col 3,23-24 Quoi que vous fassiez, faites-le de bon cœur, comme pour le Seigneur, et non pas pour des hommes, sachant que vous recevrez du Seigneur pour récompense l'héritage céleste.) car Jésus nous jugera selon nos oeuvres (Mt 16,27 Car le Fils de l'homme doit venir dans la gloire de son Père avec ses anges, et alors il rendra à chacun selon ses œuvres.).
Ainsi, l'homme qui vit la sainte messe tous les jours de la semaine mais qui ne cherche pas à fuir le péché, est-il vraiment fils de Dieu ? Il semble que oui puisqu'il vit chaque jour la sainte messe, source et sommet de la foi catholique. Il semble que non puisqu'il ne cherche pas à fuir ce qui est péché et qui déplaît à Dieu. L'homme est certes faible et toute sa vie il est pécheur (I Jn 1,8 Si nous disons que nous sommes sans péché, nous nous séduisons nous-mêmes, et la vérité n'est point en nous.), mais cela ne justifie pas qu'il doive se contenter d'une vie dépravée dans laquelle il choisit de plaire à Dieu quand son coeur le désire et de déplaire à Dieu quand sa chair s'exprime.
Saint Thomas d'Aquin dit justement que l'homme se doit de parfaire sa vie ici-bas. Ce qui est parfait ne peut rien contenir d'imparfait (Mt 5,48 Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait.) Puisque Dieu est bon et que l'homme est appelé à le suivre, qu'il fuie ce qui est mal. Or le mal est la privation du bien; le mal n'a pas de réalité propre puisqu'il est la déformation d'un acte bon. Le bien est l'objet même de la charité car le bien trouve sa source en Dieu. Et la charité est ce qui transforme la foi en vertu au point de lui donner le premier rang dans les vertus (I Co 13). Ainsi, faire le mal, c'est agir contre la charité qui provient de Dieu (I Jn 4,8 Dieu est dilection), par l'Esprit-Saint et qui est Dieu Lui-même dans sa perfection (Mt 5,48). Faire le mal, c'est pécher, c'est s'éloigner de Dieu et de son amour. S'éloignant de l'amour divin, l'homme se rapproche de tout ce qui peut le détruire. Dieu, même s'Il aime infiniment l'homme, a horreur du péché à tel point que tout péché est une injure à Sa perfection et à Son amour. Par le péché, l'homme continue de faire souffrir le divin Créateur. L'homme se détachant de Dieu, s'attache à la créature : il s'éloigne de l'Esprit pour se rapprocher de la chair et saint Paul condamne les fruits de la chair car ils sont moyens de destruction de l'homme (Ga 5).
Pour vivre en harmonie avec Dieu, pour s'en rapprocher un peu plus, il faut que l'homme accepte de donner la priorité à l'Esprit-Saint, au détriment de la chair. C'est un combat de chaque instant (I Tm 6,12 Combats le bon combat de la foi; remporte la vie éternelle, à laquelle tu as été appelé) car autant Dieu se réjouit de voir l'un de ses enfants accepter de se rapprocher de Lui, autant Satan devient fou et s'acharne pour mettre à nouveau de la distance entre le Créateur et la créature; Dieu veut nous élever au rang de Dieu (Ps 81,6) tandis que Satan veut nous abaisser au rang d'animal. D'un côté, Dieu nous appelle à Le suivre et d'un autre côté, Satan agit dans le sens opposé. Les forces en présence sont-elles d'une puissance égale ? Jésus est Dieu et Satan est un ange. Jésus agit alors par amour selon sa nature divine qui lui confère une puissance infinie (Dieu Tout-Puissant). Satan agit par haine et vengeance et selon sa nature angélique qui lui donne une puissance infiniment moins élevée que celle de Dieu. Le livre de l'Apocalypse nous dit aussi que le Christ vainc définitivement Satan, ce qui prouve son infinie supériorité face à toute autre créature (en dehors du Père et de l'Esprit-Saint) et ce, quelle que soit la puissance que Dieu lui a accordée. La vie des saints nous prouve encore que plus l'homme grandit dans la sainteté en renonçant à la chair et à lui-même pour s'attacher à l'Esprit de Dieu, plus l'homme est tourmenté par Satan. Et ce qui est rassurant, c'est que plus l'homme fait confiance à Dieu en s'abandonnant à Lui, plus Dieu agit en lui et lui donne la force de résister aux tentations (Rm 8,35-37 Qui nous séparera de l'amour du Christ ? Sera-ce la tribulation, ou l'angoisse, ou la persécution, ou la faim, ou la nudité, ou le péril, ou l'épée ? Selon qu'il est écrit : "A cause de toi, tout le jour nous sommes livrés à la mort, et on nous regarde comme des brebis destinées à la boucherie." Mais dans toutes ces épreuves nous sommes plus que vainqueurs, par celui qui nous a aimés.)

Ajoutons encore que pour plaire à Dieu il faut renoncer à soi. Comment concevoir cela sachant que Dieu nous a créés par amour et que la charité passe aussi par l'amour de soi ? Renoncer à soi, c'est d'abord reconnaître que l'homme ne peut rien faire de bon par lui-même (Ph 2,13 C’est Dieu qui opère en nous le vouloir et le faire.). C'est à cause de sa miséricorde, que Dieu a créé du néant, a utilisé de l'argile pour faire un homme qu'Il aime au point de désire de l'adopter comme vrai fils de Dieu. En créant l'homme à son image, Dieu lui donne le libre choix, celui de dire oui à Dieu ou non à Dieu. S'il dit oui à Dieu, Dieu exauce sa prière en lui donnant les talents, les dons de vivre pour Sa gloire (II Co 3,5 Ce n'est pas que nous soyons par nous-mêmes capables de concevoir quelque chose comme venant de nous-mêmes; mais notre aptitude vient de Dieu). Si l'homme dit non à Dieu, il dit oui à Satan et accepte la destruction, le péché, la vaine gloire, l'orgueil, etc. Satan propose à l'homme un bonheur selon la chair et Dieu, un bonheur infiniment supérieur, d'abord selon l'Esprit, mais truffé d'embûches. Notre nature fragile nous fait plus facilement pencher vers les propositions de l'Ennemi qui semblent alléchantes plutôt que la vie proposée par Dieu qui commence bien souvent par des tribulations, des souffrances, des remises en questions, des doutes, des peurs. Renoncer à soi, c'est fermer la porte à Satan, c'est se plonger tout entier dans l'amour de Dieu en criant : "Je suis tout à vous mon Dieu et faites de moi ce que Vous voulez ! Je trouve ma joie dans votre amour, mon réconfort dans votre force, mon accomplissement dans votre grâce." Mais peut-on définitivement dire non à Satan ? Nous le pouvons par la bouche, mais pas toujours dans le coeur, car tant que l'homme vit ici-bas, la chair continue de vivre. Pour Dieu, elle est un moyen d'éprouver la foi de son enfant. Pour Satan, elle est un levier pour le faire chuter. C'est bien à juste titre que l'on peut dire :
quand vous êtes en peine, glorifiez le Seigneur;
quand vous doutez, bénissez le Seigneur;
quand vous êtes heureux, rendez grâces à Dieu;
quand vous tombez, attrapez la main tendue du Christ;
quand vous péchez, ne tardez point à demander pardon à Dieu.

Pour obtenir la vie éternelle, nous avons vu qu'il faut aimer comme Jésus nous aime, qu'il faut fuir le péché et les fruits de la chair, qu'il faut éviter de trop s'attacher à la créature à cause du risque de se détacher du Créateur.

Que pourrions-nous dire encore ? Ecoutons saint Paul parlant du péché : Pour toi, homme de Dieu, fuis cela; recherche au contraire la justice, la piété, la foi, la charité, la patience, la douceur. (I Tm 6,11) Voilà un beau programme de vie sur terre, non ? Mettons cela en pratique, mettons Dieu en premier dans notre vie, dans nos moindres gestes, nous verrons combien il est de plus en plus facile et de plus en plus agréable à l'âme de chercher à plaire à Dieu en renonçant à tout ce qui Lui déplaît et que nous savons soit par l'Ecriture Sainte, soit par notre conscience, soit par le partage communautaire dans l'Eglise.
Vous ne souhaitez pas vivre dans les flammes d'un enfer éternel ? Laissez-vous brûler par le feu d'amour du Christ et refusez d'ouvrir la moindre porte au péché, combattez les tentations; alors vous vivrez dans un feu éternel qui ne consumme point (comme dans le buisson ardent), mais qui réchauffe éternellement le coeur, qui illumine l'âme, ravit le visage et qui transfigure l'être tout entier, à l'image du Christ.

Renoncer à soi, c'est désirer être pleinement soi en Dieu le Père, en imitant son Fils unique Jésus-Christ, en laissant l'Esprit-Saint agir partout en nous

 

Date de dernière mise à jour : 05/07/2021

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